Depuis plusieurs mois, le CRA-W teste un pulvérisateur relié à l’intelligence artificielle. Équipée de caméras et lumières LED, la machine cible localement les mauvaises herbes. Elle permet de réduire jusqu’à 90 % l’utilisation de pesticides sur le champ.
Ce n’est plus un tabou : les nouvelles technologies font aujourd’hui pleinement partie des outils au service des agriculteurs. En témoignent les robots agricoles autonomes et connectés.
À Gembloux, du côté du Centre wallon de Recherches agronomiques (CRA-W), la dernière innovation en vogue prend la forme d’un pulvérisateur de précision renommé Ara, développé en Suisse. L’engin permet de cibler localement les mauvaises herbes, appelées adventices. Il est équipé de buses d’épandage très rapprochées, mais surtout d’un système relié à l’intelligence artificielle.
"La machine est équipée d’une caméra constituée de capteurs spectraux. Cette caméra va pouvoir identifier les mauvaises herbes dans la culture. Et grâce à l’intelligence artificielle, elle va pouvoir déclencher la buse sous laquelle la mauvaise herbe se trouve," explique Quentin Limbourg, chef de projet de l’unité Productions végétales au CRA-W.
"Par rapport à un pulvérisateur classique qui a une buse tous les 50 centimètres, ici on est vraiment très rapproché : il y a une buse tous les quatre centimètres, qui travaille de manière très ciblée."
Une efficacité robotique à l’étude
Disponible sur le marché depuis quatre ans, cette machine permet donc de diminuer l’utilisation d’herbicides ou de pesticides sur les cultures. Aux côtés d’autres robots, Ara est actuellement testée avec attention par le CRA-W, dans le cadre du projet européen AgRoboConnect.
"On travaille sur une plateforme regroupant différentes parcelles et cultures. On se concentre sur une rotation maïs, betterave et froment," détaille Alix Hubaux, attachée scientifique au CRA-W.
L’équipe détachée sur cette recherche travaille en plusieurs étapes."On met en place des quadrats que l’on suit au fil de la saison en prenant des images à l’aide d’un drone. On va ensuite géoréférencer chaque adventice et observer, au fil du temps, l’efficacité de chaque innovation."
Une carapace résistante au vent
Les observations collectées par le CRA-W seront analysées dans quelques mois. Mais plusieurs avantages, liés notamment à la forme en carapace du pulvérisateur Ara, peuvent déjà être mis en avant.
"Aujourd’hui, on a pas mal de vent. Si on était sur une pulvérisation classique, on ne pourrait pas traiter les mauvaises herbes. Mais grâce à cette carapace, qui crée un environnement fermé, on peut pulvériser," explique Julien Theys, technicien de recherche au CRA-W.
"On peut aussi imaginer pulvériser dans des conditions nocturnes. Grâce aux lumières LED, c’est parfaitement possible."
Une machine onéreuse
Une licence est naturellement nécessaire pour utiliser cette machine de pointe. Il faut également mettre la main au portefeuille : coût estimé, 140 000 euros à l’achat, auxquels s’ajoute un coût de maintenance annuel de 6 000 euros.
"Ces machines deviennent très onéreuses, ce qui va peut-être changer la manière dont les agriculteurs acquièrent leur matériel," poursuit Quentin Limbourg. "Le débit de chantier est très faible. Je pense donc qu’un agriculteur seul ne pourra jamais se procurer une telle machine."
La solution se situe donc peut-être du côté des entrepreneurs agricoles : "C’est ce qui se passe de plus en plus en Belgique. Un entrepreneur pourrait très bien acheter la machine, proposer ses services et couvrir un nombre d’hectares beaucoup plus élevé."
Au total, l’outil permet aux exploitants d’économiser jusqu’à 90 % du produit répandu sur les champs contre les adventices. La plus-value est donc à la fois économique et environnementale.
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